Une semaine avant l’attaque, le Maire de Tallinn avait demandé aux habitants de quitter la ville mais l’évacuation fut un échec. En fait, personne ne s’attendait à une telle offensive.
D’autres attaques aériennes soviétiques avaient précédé (été 1941, puis en 1942-43) mais celle-ci fut de loin la plus violente
Dans la nuit du 9 au 10 Mars 1944, 300 avions larguent plus de 3000 bombes sur Tallinn, dont 1725 explosives et 1300 incendiaires. La capitale estonienne ne s’en remettra pas. Un tiers de la ville est détruit, 554 civils tués, plus de 650 blessés et 25 000 personnes laissées sans toit pour la fin de l'hiver.
Tallinn après le bombardement - au fond, l'église St Olav |
Le théâtre Estonia après le bombardement |
Les ruines de la rue Harju avant 2007 |
Sans parler de la perte de patrimoine historique et culturel. 10% des bâtiments de la vieille ville détruits mais aussi les Archives de la ville de Tallinn comprenant une collection importante de documents médiévaux. Par ailleurs, la plupart des maisons construites en bois n’ont pas résisté aux flammes.
Le but de cette manœuvre était avant tout de saper le moral des civils fermement opposés à un retour des soviétiques. Ceci n’a eu pour effet que d’augmenter l’hostilité du peuple estonien envers l’armée soviétique.
Quelques jours auparavant, le 6 mars 1944, la vieille ville baroque de Narva fut totalement rasée par un bombardement et, un peu plus tôt, le 27 février, un autre raid aérien avait pris la vie de quatre enfants en train de jouer dans la cour de leur école de la commune de Luunja (sud-est de l’Estonie).
Le jour de leur enterrement fut décrété jour de commémoration national. Henrik Visnapuu écrit à cet occasion le poème « Uus Heroodes » - traduire « Hérode moderne », en référence à l’épisode du Massacre des Innocents de l’Evangile selon Matthieu.
Et le 9 Mars, c'est au tour de Tallinn. Pour les Estoniens, c’en est trop et l'ennemi est véritablement devenu soviétique. Sur les ruines du théâtre Estonia, un slogan fut écrit :
« Varemetest tõuseb kättemaks!” (Des ruines s'élèvera la vengeance!)
Voici une vidéo colorisée montrant les dégâts suivant le bombardement:
Si le théâtre Estonia a été reconstruit en 1947, les ruines de la rue Harju ont été conservées jusqu’en 2007 avant qu’un parc ne vienne s’installer et remettre en valeur ce quartier.
La rue Harju aujourd'hui |
http://ww2panorama.org/panos/andrei_bodrov_tallinn.html
L'emplacement du parc aujourd'hui:
Le dernier raid aérien soviétique sur Tallinn eu lieu le 22 Septembre 1944 et il conduit à la retraite des Allemands d'Estonie.
8 commentaires > Laisser un commentaire :
Super ,ton post ,très intéressant !
Je reconnais la rue Harju ,tu l'as donc connue lorsqu'il y avait encore les ruines.
Le panorama pour voir la rue est très pratique pour se repérer !
Ces faits prouvent (s'il en était encore besoin) que les soviétiques ont toujours considéré les Baltes comme des ennemis. Et que leur pseudo libération, encore magnifiée par la Russie d'aujourd'hui, n'est qu'un mythe.
Incroyable, mais où sont passées les ruines? Mon dernier voyage en Estonie remonte à 2006.
Merci pour cette info.
Céline
En effet, elles ont laissé la place à un parc (bien coûteux d'ailleurs) en 2007.
Mais il faut dire que les ruines n'étaient plus entretenues et ne mettaient vraiment pas en valeur l'entrée de la vieille ville!
Si vous trouvez le temps, vous pouvez feuiller le magazine "Viisnurk", paru de 1940 à 1941. Ce magazine dedié à la culture, l'art et la littérature estonienne a disparu avant le début de l'occupation allemande. Un bon moyen de retrouver le goût du temps! L'idéologie soviétique s'y manifeste dans toute sa clarté.
Si vous trouvez le temps, vous pouvez feuiller le magazine "Viisnurk", paru de 1940 à 1941. Ce magazine dedié à la culture, l'art et la littérature estonienne a disparu avant le début de l'occupation allemande. Un bon moyen de retrouver le goût du temps! L'idéologie soviétique s'y manifeste dans toute sa clarté.
Malheureusement, et en regard de ces 554 civils tués dans les dommages collatéraux (mais on est très loin du bombardement allié de Dresde : plusieurs dizaines de milliers de morts) les soviétiques sont arrivés trop tard pour l'assassinat de 5000 estoniens d'obédience communiste, 242 tziganes et les 929 juifs qui avaient décidé de ne pas suivre le retrait de l'Armée rouge lors de l'opération Barbarossa.
Mais les Soviétiques étaient bien là en 1940 et 1941 pour déporter 8 000 Estoniens ( dont plus de 2000 furent exécutés). Sans oublier les 33 000 estoniens enrôlés de force dans l'armée soviétique, dont 10 000 sont morts des conditions de survie inhumaines.
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